Une déclaration de Pesticide Action Network (PAN) Africa à l’occasion de la Journée Mondiale contre le Paludisme
Déclaration sur l’utilisation du DDT dans la lutte contre le Paludisme en Afrique
La journée mondiale de lutte contre le paludisme, le 25 Avril 2016 est l’occasion encore une fois pour Pesticide Action Network (PAN) Africa de renouveler son soutien à la Convention de Stockholm et réaffirmer sa position contre l’utilisation du DDT dans la lutte contre le paludisme.
Depuis plus d’une décennie, d’après l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), de nombreux pays du continent africain enregistrent une baisse très importante de la mortalité et de la morbidité dues au paludisme. D’autres méthodes de lutte autre que le DDT sont de plus en plus couramment utilisées avec des résultats satisfaisants. La grande majorité de ces méthodes restent néanmoins chimiques, que ce soit, les moustiquaires imprégnées à longue durée d’action, les traitements avec les produits pharmaceutiques, la pulvérisation intra-domiciliaire, ou encore les vaccins en cours d’essai. L’utilisation des produits chimiques pour remplacer le DDT comporte cependant des risques non négligeables sur la santé humaine et l’environnement. Elle préoccupe de nombreux professionnels de la santé et des scientifiques. En 2014, l’OMS a estimé qu’il a été distribué 214 millions moustiquaires imprégnées à longue durée d’action dans les pays africains où la maladie est endémique, élevant le nombre de moustiquaires imprégnées distribuées depuis 2012 à 427 millions.
Peu d’informations sont disponibles sur les initiatives non chimiques (lutte biologique ou gestion environnementale) telles que les panneaux solaires pièges à moustique développés par le Centre de Physiologie et d’Écologie des insectes en collaboration avec l’Université de Wagenigen des Pays-Bas ; la lotion anti moustique locale à base de la cataire (Nepeta cataria) de l’ONG Burundaise (Agence Consultative en Éthique de la Coopération Internationale (ACECI)) ; l’utilisation d’insecticide naturel tel que le Neem (Azadirachta indica) au Sénégal, ou l’utilisation de plantes pour prévenir le paludisme, au Congo avec le Lemon grass (Cymbopogon flexuosus L.)
En 2015, des chercheurs au Kenya ont découvert un produit chimique appelé Cedrol ; celui-ci a le pouvoir d’attirer les moustiques femelles près des gites (en bordure des plans d’eau). La méthode consiste à attirer et piéger les moustiques femelles avant qu'elles ne pondent leurs œufs, offrant un nouvel espoir dans la lutte contre le paludisme.
Dans le rapport de l’OMS sur la stratégie technique mondiale de lutte contre le paludisme 2016-2030, le coût global de mise en œuvre de la stratégie avoisine les US $2,7 milliards et estime que les investissements annuels devront atteindre US $6,4 milliards par an au total d’ici 2020 pour que le premier objectif intermédiaire, consistant à réduire de 40 % l’incidence du paludisme et des taux de mortalité, soit atteint. Il faut cependant noté que ces fonds sont destinés essentiellement aux techniques de lutte chimique et sur l’amélioration des stratégies de lutte contre le paludisme au niveau national et international. La lutte non chimique n’est que très peu évoquée dans ce rapport. Il est grand temps que les institutions telles que l’OMS donnent la priorité aux techniques et moyens non chimiques de lutte contre le paludisme en rendant plus accessible les ressources humaine et financière pour la recherche dans le domaine.
Le DDT présente toujours un risque réel pour la santé et l’environnement. De nombreuses recherches ont montré l’impact négatif à court et long terme du DDT sur la santé et l’environnement. De plus, les pays n’ont souvent pas le personnel suffisant pour être en mesure de rigoureusement surveiller et stopper l’utilisation illégal du DDT dans l'agriculture ou sa pulvérisation pour lutter contre d'autres maladies. La résistance accrue des moustiques au DDT et d'autres insecticides préoccupe de manière croissante. Les arguments contre l’utilisation du DDT s’accumulent au fil des années, malgré tout, les hautes institutions tergiversent toujours sur le bienfondé de ces preuves ou l’applicabilité de la suppression du DDT.
Plusieurs pays à l’instar du Sénégal ont démontré l’efficacité d’une lutte contre le paludisme sans DDT et ont arrêté de demander des exemptions pour continuer à employer le DDT dans la lutte contre le paludisme. Cela montre qu’il est bien possible de lutter efficacement contre le paludisme sans recourir au DDT.
Le rapport de l’atelier régional sur la saine gestion du cycle de vie du DDT, sous l’égide de la Convention de Stockholm, tenu en Novembre 2015 à Nairobi (Kenya), indique la marche à suivre pour une gestion saine de plusieurs pesticides dont le DDT depuis leur fabrication, leur utilisation et leur élimination. Ce rapport fait également état du manque en matière d’une bonne gestion du DDT suivant les protocoles élaborés par les pays concernés. D’autre part, ces pays sont à faible revenu ce qui réduit leur résilience face aux impacts néfastes avérés du DDT.
Sur le terrain, de nombreuses structures, des communautés, des associations, des ONGs, … sont activement impliquées dans cette lutte employant des techniques non chimiques. Ils sont des partenaires clés dans la stratégie de lutte non chimique contre le paludisme. L’important travail qu’elles réalisent au quotidien auprès des populations particulièrement les plus démunies doit être reconnue et soutenue
PAN Africa continuera son engagement dans la lutte contre le paludisme utilisant des techniques sûres, saines et durables et encourage la communauté internationale à trouver et appliquer rapidement des alternatives efficaces et efficientes au DDT utilisé dans la lutte anti-vectorielle.